AU CREUX DE LA MISSION, LES MIGRATIONS

Nous venons tous d’ailleurs, nous allons tous ailleurs... Nous sommes tous le fruit d’une migration. Le peuple de la Bible en avait une vive conscience. On comprend qu’il inscrive l’histoire du salut dans une dynamique migratoire, qui impacte aussi bien la théologie, la spiritualité, la liturgie, l’éthique que l’eschatologie.

Mais, de nos jours, la migration évoque les hordes d’hommes, de femmes ou d’enfants qui, baluchons sur la tête ou sous les bras, les yeux hagards, cherchent un hypothétique havre de paix. Des organisations familiales, locales et/ou internationales s’investissent pour leur venir en aide. L’Église y a toujours contribué, s’éclairant de la Parole de Dieu. C’est pourquoi la revue Spiritus avait consacré son numéro 225 au thème de « migrations, comprendre pour agir ».

Aujourd’hui, la prise en compte de la mobilité humaine n’est plus un service ponctuel. Elle s’inscrit au coeur de la mission de l’Église. D’ailleurs, dès la naissance du christianisme, la persécution des chrétiens
hellénistes de Jérusalem les a conduits à se disperser et à faire naître de nouvelles Églises, en Samarie et ailleurs (Ac 8, 1b-4). Par la suite, des déplacements de personnes et des migrations de divers types ont eu une influence significative sur la mission chrétienne.

Les expériences et réflexions de ce numéro s’inscrivent dans cette dynamique. Des communautés chrétiennes accueillent des femmes fuyant l‘oppression ou la misère de leurs pays d’origine pour rejoindre l’Europe. D’autres s’investissent dans le dessein de femmes d’Asie qui vont vers d’autres pays asiatiques. D’autres encore soutiennent des réfugiés du Moyen-Orient pris dans le tourbillon de la haine et de la violence, mais aussi encouragent à ne pas fuir le pays. Des instituts missionnaires revisitent leur projet missionnaire à l’endroit des Africains, soit pour les accompagner en Europe ou en Amérique, soit pour les soutenir en Afrique.

Ces différents exemples, pris parmi tant d’autres, nous montrent les conséquences des réalités migratoires sur la dynamique de la mission : première mise en contact avec l’évangile, renouveau de la foi, déplacements dans la vie des Églises. Elles provoquent la mission à un engagement social, mais aussi géo-politique avec et en faveur de ceux qui partent ou de ceux qui restent. La migration rappelle que la mission est ici et là-bas. Et partout, elle est une dynamique d’intégration dans une aventure humaine
et ecclésiale désormais commune, quels que soient l’endroit et la manière dont chacun la vit.

Mieux encore, la mobilité humaine nous insère dans la perspective de la nouvelle évangélisation. Les réalités socio-culturelles de notre monde, comme la migration, sont des lieux qui nous provoquent à d’autres manières de témoigner du Seigneur de la vie. On comprend que le pape émérite Benoît XVI ait placé la journée mondiale des migrants de 2012 sous le signe de la nouvelle évangélisation :

"Le thème que j’ai choisi cette année pour la Journée mondiale du Migrant et du Réfugié - « Migrations et nouvelle évangélisation » - découle de cette réalité. En effet, le moment présent appelle l’Église à accomplir une nouvelle évangélisation également dans le phénomène vaste et complexe de la mobilité humaine, en intensifiant l’action missionnaire tant dans les régions de première annonce que dans les pays de tradition chrétienne.

Paulin Poucouta