JOSEPH, LE MISSIONNAIRE AU QUOTIDIEN
N°243 - Juin 2021
JOSEPH, LE PÈRE SANS VOIX
Les nombreux écrits qui portent sur Joseph relèvent son silence tout au long des évangiles. Ainsi, lorsque Jésus reste à Jérusalem, c’est Marie, et non pas Joseph, qui l’interpelle. Étonnant dans une société patriarcale ! Devant l’inattendu de Dieu, Joseph est tout simplement sans voix ! D’ailleurs, toute sa vie sera une contemplation de l’oeuvre de Dieu, qu’il laisse se déployer et se manifester en Jésus. Il permet également à Marie de vivre sa mission.
En nous proposant, pour cette année pastorale 2020-2021, de commémorer Joseph, le père de coeur, le pape François a voulu rappeler que cet homme si discret est une figure extraordinaire dans sa manière même de vivre et de servir un ordinaire, souvent routinier, voire lassant. Joseph nous fait redécouvrir le Verbe de Dieu, qui s’est fait réellement l’un de nous.
À sa manière, ce cahier 243 de Spiritus voudrait participer à cette commémoration du « saint patron de l’Église », le père adoptif de celles et de ceux qui sont cachés en « deuxième ligne » et qui, pourtant, jouent « un rôle inégalé » dans la mission. Discrètement, ils nous invitent à donner à l’Évangile « des mains et un coeur » !
Pour cela, Joseph Tanga-Koti nous rappelle ce que le Nouveau Testament dit de son saint patron, dans les évangiles de Luc et de Matthieu, mais aussi, quoique brièvement, dans celui de Jean. L’auteur relève que les évangélistes parlent de lui toujours en lien avec Jésus et Marie. La tradition de l’Église, elle, a relevé des traits saillants de Joseph. Gustave Makaya nous en épingle quelques-uns : l’homme des « oui permanents au Seigneur », le fidèle intendant des mystères de Dieu.
S’éclairant du Nouveau Testament, mais surtout des évangiles apocryphes, Nadi Maria de Almeida et Joachim Andrade montrent la place qu’occupe Joseph, aux côtés de la Vierge de Guadalupe, dans la théologie et la spiritualité latino-américaines de la libération. Joseph prête sa voix à toutes celles et à tous ceux qui sont réduits au silence : les pauvres, les femmes, les paysans, les exclus… Par son travail, il valide l’engagement pour un monde autre. Solange Sahon Sia évoque, elle aussi, cette dynamique d’engagement à laquelle le charpentier convie la spiritualité africaine autant qu’au discernement et à la transformation des relations hommes-femmes, loin de tout autoritarisme. Justement deux femmes croisent Joseph sur le chemin de leur quotidien professionnel, où elles participent à la transfiguration de l’humanité. Marie-Célestine et Mireille en témoignent.
De plus, le silence de Joseph nous permet de mieux entendre les innombrables missionnaires de l’ombre. Ils nous dévoilent l’humain que la tendresse de Dieu fait germer en nous. Jacques Gaillot se fait l’écho de sept d’entre eux. Enfin, Lucia Martinez Romero nous fait communier au cheminement d’Anne-Marie Javouhey, la fondatrice des soeurs de Saint-Joseph de Cluny, soutenues et guidées par l’esprit de Joseph.
Oui, Joseph a vraiment un coeur de père ! Cet homme sans voix parle à toutes et à tous, par-delà les continents, les cultures, les situations socioéconomiques. Les discours et les témoignages multiformes sur lui en sont bien la preuve. Certes, ils peuvent être redondants. Mais n’est-ce pas le signe que, dans nos diversités, nous partageons l’héritage commun de notre père Joseph ? Alors, à l’unisson, et en communion avec le pape François, adressons-lui notre prière :
Salut, gardien du Rédempteur,
époux de la Vierge Marie.
À toi Dieu a confié son Fils ;
en toi Marie a remis sa confiance ;
avec toi le Christ est devenu homme.
Ô, bienheureux Joseph,
montre-toi aussi un père pour nous,
et conduis-nous sur le chemin de la vie.
Obtiens-nous grâce, miséricorde et courage,
et défends-nous de tout mal. Amen ! (Pape François, Patris corde).
Paulin Poucouta