Au dernier Synode romain de 1974 qui traitait de l'Evangélisation, la formule d'Eglise locale est revenue très souvent dans la bouche des évêques africains et asiatiques. Mais l'usage s'en répand également dans les Eglises occidentales. Tous les théologiens seront d'accord pour dire que le mystère de l'Eglise est vraiment présent dans les communautés de croyants qui professent leur foi en Jésus Christ en communion avec la succession apostolique, qui se réunissent pour célébrer l'Eucharistie, confronter leurs engagements et maintenir l'espérance du Royaume. Mais ce mystère de l'Eglise s'incarne dans des communautés concrètes : les Eglises locales.

Est-ce à dire que le mot est univoque ? « Donner lieu » à l'Evangile par des rassemblements de croyants est une aventure commencée depuis vingt siècles. C'est aussi une tâche complexe dans la réalité d'aujourd'hui. Il n'est peut-être pas inutile d'y réfléchir en partant d'expériences dans les multiples situations et cultures.

L'expression « donner lieu » à l'Eglise peut faire songer au découpage géographique en diocèses et paroisses : si c'est là un cadre nécessaire, ce n'est qu'un cadre, et pour des réalités qui ne relèvent pas de la géographie seulement. Donner lieu à l'Eglise, est-ce reconnaître une autonomie au sein d'une communion? Mais alors quelles institutions se donner, pour que la formule ne reste pas un vain mot ? Est-ce déterminer des processus d'appartenance et mettre en place des modes de participation qui varieront selon les données sociales ? Est-ce se couler dans une tradition pour en saisir le dynamisme en sachant qu'être fidèle, c'est maintenir la nouveauté chrétienne dans des conditions actuelles ? Donner lieu à l'Eglise, n'est-ce pas situer le témoignage chrétien comme un phénomène social qui ne peut être enfermé dans la privatisation.

Si les structures - Parole, Sacrements, Succession apostolique - demeurent les principes constitutifs de l'Eglise, les formes ecclésiales, elles, seront variables, avec des différences dont l'intégration organique ne se fera pas sans peine et sans confrontation. Il nous faudra apprendre à gérer les oppositions et les conflits. Car, si le singulier - Jésus Christ qui, par son Esprit nous donne la foi - est à l'origine, l'universel réconcilié ne peut être une uniformité imposée : il est l'unité dans la charité, horizon vers lequel nous ne devons cesser de tendre.

Spiritus